Episode 105

Vendredi 20 août 1965

L’édito polémique 

Le Peyton Place Clarion est habituellement plus un objet de fierté qu’une controverse locale. Il attend patiemment devant les portes des maisons le matin, jusqu’à ce que les hommes partent travailler, et que les femmes s’assoient avec une tasse de café et lisent les dernières nouvelles. Cependant, l’édition d’aujourd’hui va bouleverser la vie de certains habitants de Peyton Place.

Depuis l’arrière d’une camionnette, le vendeur de journaux jette le Clarion devant la porte des maisons.


Elliot entre dans la cuisine tandis que Constance est occupée à lire le journal. 

— Bonjour, chérie.

— Le héros du jour ! claironne Constance ironiquement

— Ne sois pas si effrayée.

Elliot embrasse Constance sur la joue.

— Tout le monde aimait Don Quichotte.

Allison arrive à son tour et salue ses parents. 

— Je viens de faire un rêve bizarre à propos d’Oncle Matt. Il était en Afghanistan et il grimpait sur une montagne, avec des milliers d’enfants qui le suivaient comme on suit le joueur de Flûte enchantée. Et ils écoutaient tous les mêmes contes qu’il me racontait quand j’étais enfant. Il va me manquer. C’était un bon rédacteur. 

Allison s’assoit à table.

— J’espère que tu seras aussi loyal avec moi, dit Elliot. 

Allison ouvre le Clarion et commence à lire à voix haute :

— Une lettre à l’éditeur, par Elliot Carson.

— Pas à table. Tu le liras après le petit déjeuner, intervient Constance. 

— Oh non, je crois que l’épouse parfaite et la fille du nouveau rédacteur en chef devraient lire le Clarion à tout instant, même dans la baignoire.

— Tu as raison, répond Elliot à sa fille. Laisse-la lire, Connie. 

Constance dispose les sets de table devant Elliot et Allison.

— Tu dois comprendre ce que ton père a essayé de faire en…

— Constance, j’ai dit exactement ce que je ressentais dans cette lettre.

Allison lit la lettre.

— C’est une lettre horrible.

Elliot est surpris par la réaction de sa fille 

— Qu’est-ce que tu entends par horrible ? J’essayais d’être juste.

— Parce que tu trouves que la calomnie est juste ?

— Dire que David Schuster a licencié des ouvriers de la Fabrique n’est pas une calomnie. C’est la vérité.

— Mais c’est sans rapport.

— Je te demande pardon. C’est la raison pour laquelle j’ai écrit cette lettre.

— Non, cette lettre est une attaque personnelle dirigée contre David Schuster. Ce n’est ni vrai, ni…

— Allison, je suis tenté de croire que l’automatisation de la fabrique signifiera la mort de Peyton Place.

— Alors pourquoi n’as-tu pas écrit une lettre contre l’automatisation plutôt qu’une lettre contre David Schuster ?

— Parce que je ne suis pas contre l’automatisation. Je suis contre l’abus de l’automatisation de la fabrique pendant la nuit.

— Mais David Schuster n’a pas…

— Pas encore, mais il le fera. Il a été envoyé ici pour faire ce travail. Sauver la fabrique, ou la couler. Et il le fera, parce que les hommes comme David Schuster n’ont que faire de la vie des gens. S’il décide d’automatiser la fabrique, il le fera rapidement, puis il s’en ira. Il quittera Peyton Place, ravi d’avoir remis l’usine  sur pied, mais sans une seule pensée pour tous ces gens qui auront perdu leur travail.

— Ce n’est pas vrai, s’insurge Allison. 

D’une voix calme, Constance souhaite mettre un terme à cette conversation :

— Il se fait tard. Je ferai mieux d’aller m’habiller.

Constance se lève, quitte la cuisine et se rend au premier.

—  Si Schuster ne m’avait pas renvoyée, est-ce que tu aurais écrit tout de même cette lettre ? s’enquiert Allison. 

— Bien sûr. Quelle question ! Tu ne me crois pas ?

— J’aimerais.

— Mais tu ne peux pas.

— Tu ne connais pas David Schuster. Tu l’as seulement rencontré… combien ? Une fois ou deux ? Et tu utilises des mots comme « arbitraire » et « insensible ». Qu’en sais-tu ? Tout ce que tu sais sur David Schuster, c’est que sa femme m’a virée, arbitrairement.

— Lui a renvoyé de nombreux ouvriers, arbitrairement.

— Il aurait pu avoir une raison, d’après sa femme. Elle pensait qu’il commençait à bien m’aimer.

— Allison, ça n’a rien à voir. Et je te crois. Cela n’a rien à voir.

— En es-tu sûr ?

— Bien sûr. Allison, tôt ou tard, tu vas devoir te réveiller en prenant conscience que le monde ne tourne pas autour de toi. Je t’aime beaucoup, et je m’inquiète pour toi, et je pense à toi, et j’essaie d’être un bon père pour toi.

— Il me semble que les choses seraient beaucoup plus faciles si tu voulais simplement arrêter d’être un aussi bon père.

— J’essaie simplement de te dire que, bien que je pense beaucoup à toi et que tu es très importante pour moi, je dois penser aussi à d’autres choses. Cette ville, par exemple. Je déteste voir Peyton Place, tel que nous la connaissons, mourir à petit feu.

— Ce n’est pas ce que tu as dit. Tu as dit que tu détestais David Schuster. 

Elliot hausse le ton :

— Non, attends une minute ! Cette lettre n’est pas une attaque personnelle. Pas plus d’ailleurs que la défense que tu prends de monsieur Schuster n’en est une pour moi.

Allison ne veut pas en écouter davantage. Elle se lève. 

— Veux-tu bien m’excuser ?

Et elle s’en va. 


À l’appartement, Rodney et Norman prennent leur petit déjeuner. Ils parlent de sport, avec les Red Sox qui ont encore perdu, puis Norman découvre l’édito d’Elliot dans le Clarion. 

Rodney connaissait déjà le problème des licenciements, David Schuster lui en avait parlé lors de son entretien d’embauche. 

Norman lui raconte la soirée superbe qu’il a passée avec Rita et des homards qu’ils ont mangés.  Rodney est furieux contre lui qui a dépensé tout son salaire de la journée (7 dollars) dans un dîner avec Rita à « La soupe de poisson » hier soir. 

Norman doit de l’argent à Rodney et ne devrait pas tout dépenser en un seul rendez-vous avec Rita Jacks. Rodney veut dire par là que Rita se serait contentée d’un simple hamburger à la place du homard. 

D’ailleurs, Norman lui demande de lui prêter cinq dollars pour aller à l’épicerie. 


Le Dr Rossi entre dans la librairie et discute avec Constance. Il parle de la visite que lui a faite Ada Jacks à son cabinet. Ada se fait du souci pour sa fille Rita. Il demande à Constance si elle sent que Rita a des problèmes. 

Constance lui répond qu’elle a le sentiment que Rita est bouleversée et confuse à cause de quelque chose qui a dû se passer. Le médecin ne se voyait pas comme conseiller pour les femmes, aussi n’a-t-il rien dit à Ada.

Michael dit à Constance qu’elle s’est mariée avec un type bien. Il a lu la lettre à l’éditeur du Clarion, et il approuve. Constance remarque qu’Elliot se met facilement en colère et rapidement prêt à l’attaque.

Puis Michael lui parle de Vincent Markham et de la proposition qu’il lui a faite de l’accompagner au Pérou. Il dit qu’il réfléchit encore. 

Il s’en va, tandis que Julie Anderson arrive pour parler à Constance de l’édito d’Elliot. Julie est furieuse. Elle dit à Constance que David Schuster est un homme bon. Certes, Elliot a le droit d’avoir son opinion. Cependant,  Julie sait faire la part des choses et n’oublie pas non plus qu’il a beaucoup aidé George. Pour cela, elle lui en sera toujours reconnaissante.


Kenneth Markham dicte une lettre à Harry Fletcher, son assistant. Vincent frappe à la porte et Kenneth le fait entrer. Vincent est disposé à signer l’accord pour obtenir les fonds dont il a besoin pour son travail au Pérou. Il vient donc lui demander l’argent. 

— Vincent, je ne veux pas que tu te tues, lui dit Kenneth. 

Cependant, Kenneth met le document sur la table pour que Vincent le signe. Vincent s’assoit et signe le papier. Kenneth lui dit à cet instant qu’il a toujours été fier d’être son frère. Il lui demande si Claire compte retourner avec lui là-bas. Vincent ne le pense pas. 

Puisque les deux frères décident de jouer cartes sur table, Vincent admet qu’à une certaine époque, il enviait la vie de Kenneth, avec Elisabeth et ses enfants.


Doris apporte une boîte de bonbons pour Julie à la fabrique. Cette dernière appelle son patron par interphone et David sort de son bureau pour saluer sa femme. Il dit à Doris qu’elle ne l’interrompt pas. Il demande où est Kim. La fillette est à une fête. 

Elle prévient David que toute la ville parle de l’édito d’Elliot paru dans le Clarion. Il lui dit que cette lettre est avant tout émotionnelle et irrationnelle. Doris pense que c’est une attaque personnelle parce qu’ils ont renvoyé Allison. David lui rappelle alors que c’est elle qui a renvoyé Allison, pas lui.


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